Vous êtes l'université : Oulmann Zerhouni lie réalité virtuelle et prévention contre le tabagisme.

Une recherche avec un petit accent futuriste qui vous donnera furieusement envie d'y participer !

Publié le 2 décembre 2020 Mis à jour le 26 février 2021

Nous avons rencontré Oulmann Zerhouni, qui nous expliquera à la fois son parcours et comment se déroule le lancement de son projet mené en collaboration avec l'Université Erasmus de Rotterdam et l'Université d'Amsterdam. Ce projet en psychologie est financé par l'Institut de recherche en santé publique (IREsP) et l'Institut national du cancer (INCa). Il permettra de mieux comprendre les mécanismes qui conduisent à la consommation de tabac, en les évaluant dans des situations à la fois écologiques et contrôlées, tout en testant l'efficacité des interventions visant à aider les individus à arrêter de fumer. Ces connaissances pourront ensuite être appliquées aux domaines de la prévention et de la santé afin d'améliorer les futures campagnes de prévention du tabagisme.

Crédit : V. Roland
Crédit : V. Roland - Crédit : V. Roland Crédit : Vincent Roland - deusexmuraena.com
L’équipe Point Commun : Bonjour, merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Pour commencer, pouvez-vous présenter votre parcours académique mais aussi le cheminement personnel qui vous a fait choisir ce métier ?

Oulmann Zerhouni : Je m’appelle Oulmann Zerhouni, j’ai 33 ans et suis Maître de Conférences HDR au Laboratoire Parisien de Psychologie Sociale à l’Université Paris Nanterre (ndrl : découvrez la fiche de compétences du LAPPS ici et toutes les autres ici) depuis septembre 2016.

J’ai suivi un parcours relativement classique : après avoir obtenu mon baccalauréat au Lycée Français de Rabat au Maroc, j’ai enchaîné avec des études de Psychologie à l’Université Grenoble-Alpes, que j’ai achevées en 2015 avec l’obtention d’un doctorat en Psychologie Sociale Expérimentale, mené sous la direction de Laurent Bègue. Mes travaux portaient à l’époque sur l’influence de la promotion « indirecte » de la consommation d’alcool dans les médias (par exemple via l’exposition à des personnages qui consomment de l’alcool dans les films). Un des « défis » de ces travaux était de trouver un moyen d’évaluer l’impact de ces représentations avec des mesures en laboratoire, tout en conservant un maximum de réalisme écologique. J’ai continué par la suite à travailler sur la prévention des conduites addictives de manière générale, tout en menant des travaux plus « fondamentaux » sur la régulation du stress et des émotions.

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L’équipe Point Commun : Le projet que vous portez “LA RÉALITÉ VIRTUELLE POUR ÉVALUER ET AMÉLIORER LES MESSAGES DE PRÉVENTION ANTI-TABAC” vient de remporter un financement de l'IresP-InCa (Institut de Recherche en Santé Publique et Institut National du Cancer). Toutes nos félicitations à vous et votre équipe ! Vous êtes donc partis pour 3 années et demi de recherches ! 

Concrètement, comment mènerez-vous cette étude ? Quels sont les protocoles que vous avez conçus pour évaluer l’efficacité d’une campagne de prévention ? Vous allez utiliser des dispositifs de “réalité virtuelle” et même de “ville virtuelle”, pouvez-vous nous en dire davantage ?

Oulmann Zerhouni : Tout le problème dans l’évaluation de phénomènes comportant des communications de masse est d’arriver à la fois à employer des mesures robustes et fiables, et de pouvoir contrôler les variables environnementales – ce que l’on trouve habituellement en laboratoire – tout en conservant une forme de réalisme, que l’on retrouve dans les études de terrain. Avec des collègues, nous avons donc pensé à une solution permettant de concilier le meilleur des deux mondes, c’est-à-dire recréer des environnements les plus réalistes possibles en laboratoire. Dans les études que nous avons prévues, les participants se placent dans une cabine qui les immergent dans un monde interactif en 3D et réaliste. Les participants sont ensuite déplacés dans l'environnement virtuel pendant qu'ils se trouvent dans la cabine. Cela permet également au chercheur d’avoir un degré optimal de contrôle de l’environnement et des actions qui s'y déroulent, avec le contrôle supplémentaire de l'introduction de différents types de stimuli sensoriels, notamment l'odeur, la température, le flux d'air, les tremblements, le goût et les fréquences lumineuses, qui sont synchronisés avec l'environnement visuel et les stimuli auditifs, ce qui permet de recréer fidèlement des environnements très immersifs.

Une première étape de ce projet consiste donc à créer des environnements virtuels simulant des environnements réels. Nous sommes en train de recréer des zones de la région parisienne dans laquelle les participants pourront se déplacer et effectuer certaines tâches tout en étant exposés à des messages de prévention anti-tabac, et d’interagir avec des avatars virtuels. Des outils de mesure développés avec une équipe d’ingénieurs nous permettent de suivre la position du regard des individus ainsi que leurs réactions physiologiques et de les mettre en correspondance avec des mesures de mémorisation des messages et leur envie de fumer.


L’équipe Point Commun : Quels sont les mécanismes psychologiques (physiologiques, émotionnels ou cognitifs) que vous espérez particulièrement mettre en évidence ou élucider ?

Oulmann Zerhouni : Je m’intéresse principalement à la façon dont les individus vont mémoriser et associer des objets de leur environnement, et comment ces processus de mémorisation sont affectés par la surcharge cognitive et la régulation du stress et des émotions. L’approche consiste ici, entre autre, à mettre à l’épreuve des faits des prédictions des modèles de la mémoire et de la formation d’attitude. Nous cherchons en outre à déterminer si la charge cognitive due à l’environnement (bruits, individus, etc.) modulera la mémorisation de certains types de messages de prévention.
Dans le volet de la prévention ciblée, nous voulons cibler les participants pour lesquels il existe des raisons médicales d'arrêter de fumer, comme une grossesse ou la présence de certaines maladies et qui voudraient recevoir une aide pour arrêter de fumer. Ici, nous évaluons la valeur ajoutée de l'utilisation de la RV sensorielle pour administrer une intervention personnalisée en les entrainant à résister à la tentation de fumer, dans des environnements réalistes, par exemple, en les exposant à l’odeur de la cigarette, etc.

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L’équipe Point Commun : Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser aux mécanismes psychologiques menant à l'activation de l'envie de fumer ? Quels sont les sujets que vous aimeriez creuser à l’avenir ?

Oulmann Zerhouni : Depuis le début de ma carrière, je me suis toujours intéressé (entre autre) à l’impact de facteurs sociaux sur les comportements addictifs, que ce soit l’alcool, le tabac ou les troubles du comportement alimentaire. Il existe une littérature abondante sur le les facteurs neurophysiologiques et psychologiques contribuant à la dépendance aux substances, ainsi que des méthodes d’intervention permettant de réduire la consommation de ces substances (à laquelle j’ai pu contribuer). Si ceux-ci sont bien identifiés, il y a un manque d’études expérimentales sur les facteurs environnementaux et notamment médiatiques qui risquent de renforcer la consommation d’alcool ou de tabac, ou de faciliter des comportements à risque, comme par exemple les jeux d’argent et de hasard. C’est ce sur quoi je me focalise en ce moment, notamment avec ce projet.

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L’équipe Point Commun : Vous êtes membre du Centre de recherche LAPPS à l’Université Paris Nanterre, pouvez-vous nous expliquer ses missions ? Quels sont ses enjeux et objectifs ?

Oulmann Zerhouni : L’objectif du Laboratoire Parisien de Psychologie Sociale est de développer des connaissances sur la façon dont l’environnement social impacte la cognition. Cela inclut les relations interpersonnelles – la façon dont deux individus interagissent entre eux -, mais également les relations entre différents groupes sociaux, le rôle du statut social au sein d’un groupe et des idéologies, etc. Mes travaux se focalisent plus sur les mécanismes par lesquels notre système physiologique et cérébral va appréhender notre environnement social, et s’ajuster par rapport à ses demandes.

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L’équipe Point Commun : Comment avez-vous monté le dossier ? Quels sont les aspects qui selon vous ont été déterminants ?

Oulmann Zerhouni : J’ai monté ce projet avec Marilisa Boffo et Reinout Wiers de l’université d’Amsterdam, rencontrés lors de mes travaux de thèse. Reinout est francophile et fan du chanteur Renaud …. La collaboration sur ce projet s’est naturellement imposée !

La réussite de ce projet repose notamment sur les épaules de Solenne Bonneterre, doctorante au LAPPS, dont le talent n'a d'égal que l'opiniâtreté. ► Sa thèse et sa page ► ResearchGate 


Concernant le montage administratif et financier, j’ai pu solliciter les services de la DRED pour m’accompagner dans les démarches administratives et juridiques surtout concernant les recherches impliquant des participants humains.

Pour en savoir plus sur l'aide proposée par la DRED, rendez-vous sur  ► La page du Service ingénierie de projets de la DRED
On en profite pour vous annoncer une petite info en avant première : il va bientôt y avoir du nouveau sur cette page !
Mais on vous dira tout le moment venu...




Mis à jour le 26 février 2021