Héros et héroïnes du quotidien : nos étudiantes "mentores d'urgence"

Pendant le confinement (et même après), elles se sont engagées pour aider les plus jeunes. Elles racontent.

Publié le 8 juillet 2020 Mis à jour le 16 septembre 2020

#MentoratdUrgence est une opération qui a été initiée par le Collectif Mentorat qui regroupe 8 des plus grandes associations de mentorat en France. Etudiant.e.s, volontaires, actif.ve.s ou retraité.e.s, tout le monde pouvait devenir mentordurgence en s'inscrivant sur lementorat.fr, et ainsi accompagner à distance (whatsapp/skype, etc) un enfant ou un.e jeune en difficulté face à la continuité éducative .

- Techniquement comment cela fonctionne-t-il ?

Alizé, chargée du développement local de l'Afev : Techniquement, des structures "relais" étant en contact direct avec des enfants et familles, types établissements scolaires ou cités éducatives nous faisaient part de leurs besoins en termes de mentors. Pour répondre à leurs demandes, le Collectif Mentorat recrutait et formait (webinaires hebdomadaires, livrets et ressources sur le site lementorat.fr) des mentors. Les structures mettaient ensuite en relation les mentors et mentoré.e.s.

- Quand et pourquoi a-t-il été mis en place ? Est-ce toujours en place ?

Alizé : Cette opération a été mise en place pour répondre à l'urgence éducative due au confinement. L'opération est restée en place jusqu'à la mi-juillet. Néanmoins, cette rentrée est particulièrement inédite (décrochages, retards scolaires, déséquilibres dans les classes, etc.), l'Afev se doit de mobiliser les étudiant.e.s plus que jamais, afin d'accompagner le plus d'enfants et de jeunes possibles à reprendre confiance en eux, à retrouver goût en l'école, en l'apprentissage... Il est donc possible de devenir mentor avec l'Afev dès la rentrée, et les enfants en auront besoin plus que jamais !



Clara, Hélène et Claire, étudiantes à l'Université Paris Nanterre, ont été mentores pendant le confinement. Elles nous racontent cette expérience !

Quel est votre formation / votre parcours à l'Université Paris Nanterre ?
Clara : Je m'appelle Clara, je suis en licence de droit - 1ère année.

Hélène : Je m'appelle Hélène, et je suis en L2 d'Économie-Gestion.

Claire : Je m’appelle Claire, je viens de terminer ma deuxième année de licence Humanités parcours droit-économie-gestion.

Comment avez-vous connu l'Afev et le dispositif mentor d'urgence ? Pourquoi avez-vous eu envie d'y participer ?
Clara : J'ai connu l'Afev par le biais de la mission « Mentorat d'urgence » mise en place pendant le confinement. Un proche m'a fait suivre un mail où dans le cadre de cette mission, l'association cherchait des bénévoles pour accompagner les enfants dans leur travail.

Hélène : J'ai connu l'Afev en étudiant à Nanterre (dans l'annuaire des associations à la rentrée). En réalité, je voulais faire du tutorat dès mon entrée en L1, et au final je n'ai pas osé ! Quant au dispositif mentorat d'urgence, ma mère m'a mentionné des sites d'entraide spécifiques à la crise du coronavirus, avec entre autres de l'aide aux courses pour les personnes âgées, des contacts avec les personnes isolées, et du tutorat. Comme j'avais déjà envie de tutorer depuis longtemps et que j'étais dans une période plutôt propice (post-partiels), j'ai envoyé mes coordonnées au collectif d'associations.

Claire : J’ai découvert le dispositif du mentorat d’urgence début mai sur la plateforme de la réserve civique. Ce dispositif a été créé au début du confinement pour aider les enfants en difficulté et empêcher un décrochage scolaire. Au début du confinement j’avais encore beaucoup de travail et plusieurs examens à passer donc je n’avais pas de temps à consacrer à d’autres choses. Lorsque ce fût terminé, je me mis à tourner en rond dans ma chambre alors j’ai commencé à me renseigner sur des associations qui rechercheraient des bénévoles, puis sur le site de la réserve civique du gouvernement. La plupart des missions bénévoles en extérieur pour faire de la distribution alimentaire en Seine-Saint-Denis étaient complètes et sinon il s’agissait d’aide à la confection de masques en tissu mais je n’avais pas de machine à coudre. Je pensais alors n’avoir aucune aide à apporter.
Puis je suis tombée par hasard sur la mission proposée par la collectif du mentorat d’urgence ce qui m’a tout de suite interpellé.
Les écoles ayant dû fermer beaucoup d’enfants devaient avoir des difficultés à garder un rythme de vie « normal » et la compréhension des leçons et des exercices ne se fait pas aussi bien que lorsqu’on est en classe. Jusqu’au baccalauréat les études sont primordiales, même si certains professeurs ont tenté de maintenir un lien à distance avec leurs élèves en faisant des visioconférence à 30 ce n’est pas la même chose. De plus, certains enfants issus de familles étrangères ne peuvent pas souvent recevoir de l’aide de leurs parents car ceux-ci ne maitrisent parfois pas complètement le français.
J’ai donc voulu participer à la mission de mentorat car il me paraissait élémentaire que les enfants puissent étudier pendant cette période et recevoir de l’aide, même si je ne suis pas professeure je savais que je pourrais apporter des connaissances à un enfant et lui donner des explications sur d’éventuelles questions.

Comment cela s'est-il passé concrètement ? Quel âge / quel niveau avaient les élèves avec qui vous étiez en contact ?
Clara : J'ai rempli un formulaire, avec mes coordonnées et j'ai pu choisir le niveau de l'enfant que j'allais mentorer : l'école élémentaire. Par la suite j'ai été contactée par mail par une personne qui a transmis mes coordonnées à une école. La maîtresse de l'enfant que j'allais suivre m'a contactée et nous avons parlé des difficultés de l'enfant, les matières qu'il préférait et également comment je pouvais le joindre (s'il avait accès à un téléphone portable ).
L'enfant en question était un petit garçon de 10 ans en classe de CM2.

Hélène : J'ai eu des nouvelles de l'Afev fin juin, quand la réouverture des écoles primaires pour 2 semaines a été annoncée. Depuis, j'ai eu beaucoup de difficultés à communiquer avec la famille, et à organiser une rencontre par téléphone. Elle a enfin été prévue mi-juillet mais il y a eu des soucis techniques ! Mon expérience n'est donc, je pense, pas représentative d'un suivi en tutorat chez l'Afev. Pour leurs âges, c'était un frère et une sœur en CP et en CE1, je devais m'occuper de les aider à la lecture (ce qui était assez compliqué à mettre en place à distance, pour une famille sans ordinateur ni internet, d'où les difficultés rencontrées de communication).

Claire : J’avais déjà fait de l'aide aux devoirs donc je savais déjà comment procéder même si dans ce cas-là, cela se faisait à distance.
J’ai donc été mis en contact avec le collectif, j’ai échangé avec une coordinatrice qui m’a envoyé les coordonnés de la famille d’un élève de CM2, Julien, ainsi qu’un livret expliquant les objectifs du mentorat et le rôle du bénévole.
Avec la famille nous avions fixé une heure d’aide aux devoirs par semaine, que avons fait par appel téléphonique.
Au début j’avais un peu d’appréhension car j’avais demandé plusieurs fois en amont les exercices de Julien afin de pouvoir les regarder et savoir sur quels sujets nous allions travailler mais je les toujours reçu le jour même, voire au début du cours. Finalement ce n’a pas été un problème car j’ai redécouvert le programme de CM2 et je me suis rendu compte que je n’avais pas besoin de revoir conjugaison et mathématiques.
Comme cela se passait bien et que Julien assimilait bien ce que l'on travaillait, alors qu’il avait l’air de présenter au début plusieurs difficultés (notamment de la dyslexie), j’ai voulu allonger les temps de cours. Cependant il se déconcentrait au milieu du cours, ce qui n’était pas bénéfique. Puis, alors que nous envisagions de passer à deux jours par semaine, l’école a partiellement repris et nous sommes restés sur le format du début. Fin juin, je commençais à travailler en tant qu’animatrice en centre de vacances et le rythme était si intense que je n’ai pas pu aider Julien pendant deux semaines mais j’ai gardé contact avec sa mère. Nous venons de reprendre les aides aux devoirs pendant l’été afin qu’il ne perde pas le fil ainsi que pour rattraper des devoirs que nous n’avions pas pu faire.

Était-ce facilement conciliable avec les études à distance que vous continuiez de mener pendant le confinement ?
Clara : Pour ma part, mes partiels et examens étaient terminés car j'ai commencé le mentorat juste après le confinement. De ce fait je n'ai eu aucun problème de ce côté.

Hélène : Je n'ai pas tutoré mais je pense que pour le suivi d'enfants du primaire, avec 2h d'appel et 1h de préparation par semaine, j'aurais complètement pu concilier ça avec mes études en confinement, plus qu'en temps normal je pense.

Claire : J’avais terminé mes examens au moment où j’ai commencé l’aide aux devoirs pour le mentorat d’urgence.


Personnellement, qu'est ce que cela vous a apporté ?
Clara : Je trouve que c'était une bonne expérience, enrichissante. De plus j'ai aimé travailler avec un enfant et pouvoir l'aider. J'ai apprécié le principe du bénévolat et la possibilité d'apporter de l'aide "aux autres".

Claire : Ma mission n’est pas encore terminée ! Je vais aider Julien pendant le reste de l’été et nous verrons ce qu’il se passe pour le rentrée. Sa mère m’a dit que les séances l’aidait beaucoup, j’ai moi-même pu constater son amélioration et j’étais très contente de pouvoir l’aider. Une heure par semaine ce n’est pas grand chose, et pourtant cela change la donne. C’était pour moi un acte civique - j’ai eu la chance d’avoir accès à une bonne éducation cela me paraissait juste de rendre la pareille en partageant mes connaissances, surtout dans ce contexte-là. J’avais personnellement quelques difficultés à expliquer les choses aux autres de manière générale et il semblerait que cet obstacle ait disparu au moment des aides aux devoirs avec Julien. Je me suis découverte une âme de professeure !

Que diriez-vous à quelqu'un qui hésite à se lancer dans une telle expérience ?
Clara : Je lui dirai de ne pas hésiter car c'est quelque chose de bénéfique pour nous et pour celui que l'on aide.

Claire : Ce que je dirais à quelqu’un qui hésite à se lancer dans une telle expérience ? N’hésite pas ! Tu as un savoir à faire partager (peut-être que tu l’as oublié mais si tu sais plein de choses) et qui te permettra d’aider des enfants à ne pas décrocher à l’école ! L’apparition de ce virus a boulversé nos vies et nous a poussé à se remettre tous en question, cela nous a aussi montré que nous pouvions nous aider les uns les autres, que nous étions solidaires, une valeur fondamentale que l’on a trop oublié.
Si tu te lances tu vas pouvoir aider un ou plusieurs enfants de tout niveau, il n’y a pas de pression car tu es bénévole et toute aide est la bienvenue !

Une anecdote à raconter ?
Clara : Lorsque je travaillais avec le petit garçon j'avais pour habitude de lui envoyer de documents que ce soit pour la lecture, les maths... plutôt que de dire qu'il n'aimait pas la matière il envoyait des smileys contents ou mécontents qu'il supprimait presque immédiatement. Mais j'avais eu le temps de les voir.


 


Mis à jour le 16 septembre 2020